Page 21 - La Gatineau 15 juin 2017
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La Gatineau 15 juin 2017 21 Une fière chandelle à Elaine Gannon
L’HISTOIRE DU CIMETIÈRE DES PIONNIERS DE MARTINDALE
JEAN LACAILLE
jlacaille@lagatineau.com
LOW - Elaine Gannon, fière octogénaire de 83 ans, a consacré 67 ans de sa vie à préserver la mémoire de 151 Irlandais et Irlandaises enterrés au cimetière des Pionniers de Martindale à Low. Un travail de bénédictine, un engagement remarquable.
«Le prêtre de la paroisse, à la fin des années 1950, n’était pas trop coopératif. Il n’avait pas confiance en moi. Il ne croyait pas que je pouvais mener ce projet à terme. Voilà qui est fait. Mais à l’époque, il n’était pas trop indiqué pour une paroissienne de défier l’autorité du prêtre. Il a bien fallu que je le fasse parce que je trouvais qu’il était beaucoup plus important que je m’assure que la mémoire de mes compatriotes soit préservée plutôt que les conseils spiritueux d’un prêtre de passage.»
Les premiers arrivants
Les premiers arrivants Irlandais sont arrivés dans la Vallée-de-la-Gatineau, plus précisément à Low pour fuir la grande famine. Ils s’y sont installés et ont construit l’église et l’école. Usés par le temps, les monuments et les pierres tombales ne tenaient plus en place. Plutôt que de tenter de les restaurer, comme le recommande Elaine, le prêtre a plutôt réservé un buldozer qui s’est chargé de les enfouir dans une fosse commune.
«Il était donc très difficile
pour moi de retracer l’identité
des gens enterrés au cimetière
après la disparition des monuments et pierres tombales. J’ai finalement
retrouvé les documents à
Farrelton. J’ai donc récupéré toutes les fiches que j’ai ramenées à la mission de Martindale. Un réfectoire a été construit qui a été habité par le prêtre de la paroisse pendant un certain temps. Martindale est devenue une paroisse. Puis des gens sont venus m’aider. J’ai pu compter sur l’engagement de Martin Brown, Eddy McLaughlin et Bernice Mc Sheffrey. Nous avons récolté des fonds qui nous ont permis d’ériger la croix Celtique qui a été fabriquée, de granit, à Granby. Les gens sont venus ici d’Irlande pour fuir la famine du début du 20e siècle. Sur la croix, on a fait graver un bateau qui témoigne de leur arrivée à Québec. Imaginez, ils sont venus s’établir à Low, en pleine forêt, en plein hiver à 30 degrés sous zéro. Ils sont devenus des experts forestiers. Ils gagnaient leur vie et celle de leurs familles.»
En plus de la croix, trois cénotaphes ont été aménagés de même que les plaques qui témoignent de l’histoire de ces valeureux Irlandais. On donnait peu de chances à Elaine de réaliser son projet mais c’était très mal la connaître. Le projet a été exigeant, mais il fallait le faire, dit-elle. «Je n’étais pas en santé à l’époque (1960). J’ai promis que si je recouvrais la santé que j’allais travailler à ce projet tant qu’il ne serait pas réalité. J’ai tenu promesse et ce n’est pas terminé.»
L’entretien régulier
Elaine Gannon, qui peut maintenant compter sur la compréhension et l’appui du
▲ La mémoire de 151 personnes a été préservée alors que leurs noms ont été gravés sur les trois cénotaphes au cimetière des Pionniers de Martindale.
▲ Elaine Gannon, une dame au grand cœur, qui a consacré 67 ans de sa vie au projet de reconnaissance des Irlandais enterrés au cimetière des Pionniers de Martindale.
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milieu de Low, poursuit l’organisation de campagnes de levées de fonds afin d’assurer l’entretien régulièr du cimetière, l’aménagement de marches pour un meilleur accès aux visiteurs, des rampes pour les personnes handicapées de même que des bancs publics. La croix de granit a coûté, à elle seule, la rondelette somme de 10 000 $.
«J’ai 83 ans et tant que je vivrai, je vais m’intéresser au cimetière des Pionniers de Martindale. Certains de mes ancêtres y sont enterrés. Je voulais que personne ne soit oublié. Chacun a sa propre petite histoire et, pour moi, il était important de la préserver pour tous.»
En fouillant dans le jardin de ses souvenirs, Elaine Gannon s’imagine tous les efforts qui ont été déployés par ses amis Irlandais qui sont partis d’Irlande pour s’établir dans un coin de pays qu’ils ne connaissaient pas, réussir à gagner leur vie dans des conditions extrêmement difficiles.
«Nos racines sont ici. J’ai fait tout ça pour la nouvelle génération qui sera bien informée de la présence de leurs prédécesseurs. Le passé est garant de l’avenir. Et c’est un gros plus pour Low. C’est mon histoire ! C’est leur histoire.»
L’inscription gravée sur le cénotaphe au cimetière des Pionniers de Martindale se lit comme suit : «May the light of heaven shine on the souls of the Gaels who left Ireland in the years ont the Great Famine to find eternal rest in this soil. They will be remembered as long as love and music last.»


































































































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