Page 18 - Cahier Trouve-Tout-2012

Qui sont ces autochtones qu’on appelle Algonquins?
Wisakedjack était l’enfant chéri du Kichi Manitò, le Créateur de toute chose sur terre. Un jour Kichi Manitò se rendit compte que les créa- de la terre semaient la violence sur la terre et il décida qu’il fallait que le monde renaisse. Il prévint Wisakedjack qu’il allait inonder toute la terre et il lui demanda de faire monter dans son canot certains ani- maux pour les sauver des eaux qui se déverseraient sur le monde. Ils dérivèrent sur l’eau pendant longtemps et Wisakedjack annonça aux animaux que pour que le monde puisse renaître, il fallait que l’un d’entre eux
plonge loin sous les flots pour y trouver la terre.
Le huard plongea le premier et demeura sous l’eau toute une journée, sans succès. Puis le canard tenta sa chance, lui aussi en vain. La loutre et le castor es- sayèrent à leur tour et revinrent bredouille. Le rat mus- qué que tous les autres semblaient ignorer, annonça qu’il voulait faire un essai. Il plongea et demeura sous l’eau pendant trois soleils au point où tous les autres animaux pensaient qu’il était mort, mais lorsqu’il réap- parut, il avait dans sa patte une petite poignée de terre que Wisakedjack recueillit précieusement pour la pla-
cer sur le dos d’une tortue.
C’est ainsi que les Anishinabeg et la plupart des au-
tochtones de langue algonquienne se représentaient la création du monde (entendons ici l’Amérique du Nord) avant l’arrivée des prêtres européens. Ils désignent encore d’ailleurs l’Amérique du Nord comme la Tortue. On notera la similitude entre cette légende et l’histoire
de Noé dans la Bible et ce n’est pas la seule similitude avec la religion catholique, ce qui explique que la plu- part aient adhéré plus ou moins facilement à la nouvelle religion. Ils croyaient aussi en un Dieu unique, Kichi Manitò, le Créateur de toute chose, mais le panthéon amérindien s’enrichissait aussi de plusieurs esprits subordonnés au Kichi Manitò. Wisakedjack était mi humain, mi dieu et il était au cœur de plusieurs lé- gendes, multipliant les tours, les espiègleries pour faire passer ses messages aux Anishinabeg. Dans le folklore québécois, on retrouve un personnage similaire, Ti- Jean, à qui il arrivait toutes sortes d’aventures souvent mystérieuses.
Qui sont-ils?
Qui sont donc ces autochtones qu’on nomme faus- sement Algonquins aujourd’hui? C’est Champlain qui a utilisé ce terme, l’empruntant de la bouche d’un au- tochtone malécite. Or, le terme voudrait dire « Ce sont nos alliés ». En réalité, ils se désignaient eux-mêmes comme Anishinabe ou Anishinabeg, ce qui signifie « Les vrais hommes ».
Selon la tradition orale, les Anishinabeg seraient d’abord venus de la côte Est sur le bord de l’océan Atlantique, s’enfonçant à l’intérieur des terres à la recherche d’une terre promise, un concept commun à plusieurs nations à travers le monde, où la nourriture poussait sur l’eau (riz sauvage). Les Micmacs seraient demeurés sur le bord de l’océan, alors que les autres au- raient essaimé un peu partout le long du fleuve Saint- Laurent, prenant des noms différents mais gardant
une langue commune. Ceux qu’on désigne comme les Anishinabeg portaient les noms de Weskarini, Kichisipirinni, Kotakoutouemi, Kinouchepirini, Matouweskarini et Nipissing. Au nord, ils se dési- gnaient comme les Abitibiwinnis et les Timiscamings.
Les Anishinabeg de Kitigan Zibi sont surtout asso- ciés aux Kichisipirinis et aux Weskarinis qui occu- paient la rivière des Outaouais, celle de la Petite-Nation et la Gatineau. Les Kichisipirinis étaient d’ailleurs considérés comme l’une des plus importantes nations de la Nouvelle-France tant par leur nombre que par leur puissance.
Cinquante ans après l’arrivée des Européens, 80% d’entre eux étaient morts des maladies infectieuses transportées par les Européens et par la guerre avec leurs ennemis héréditaires, les Mohawks que les mar- chands hollandais avaient puissamment armés.
Georges Lafontaine
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