Page 5 - La Gatineau 6 mars 2014
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CHÂTEAU LOGUE
Le MAMROT
blâme la municipalité
La Gatineau 6 mars 2014 5
MANIWAKI - C’est un rapport qui était très attendu. Le MAMROT (Ministère des Affaires municipales, des régions et de l’occupation du territoire) a rendu ses conclusions suite aux vérifications menées concernant le dossier du Château Logue. Comme l’impose la loi, la municipalité a dû lire ce rapport lors de la dernière séance du conseil et a l’obligation de la rendre publique. Il en ressort que le MAMROT blâme la Ville dans sa gestion du dossier et l’invite à se conformer à la loi.
Le ministère a donc donné suite à la plainte déposée concernant l’aide accordée par la Ville au Château Logue de 2000 à 2013. Le sous-ministre Sylvain Boucher explique dans son rapport qu’il a été informé «qu’un entrepreneur avait démontré un intérêt, à la fin des années 1990, pour occuper des terrains municipaux afin d’y implanter, entre autres, un terrain de golf. Dans cette optique, en 2000, la Ville et le Château Logue ont signé une convention pour la construction d’une passerelle visant à établir un lien piétonnier entre les différents terrains convoités par l’entrepreneur. On me souligne que dans ce projet d’infrastructure, d’une valeur totale de 450 000$, le Château s’était engagé à assumer un montant de 205 000$, la balance des coûts étant à la charge de la Ville.»
Le rapport ajoute que la Ville et le Château «ont convenu à cette époque, dans un projet de bail emphytéotique, des montants à verser à titre de compensation pour l’utilisation des terrains municipaux connus sous le nom «fer-à-cheval et pointe- des-pères». Dans ce projet, il était initialement prévu que le Château défraierait la somme de 14 740$ pour les années 2000 à 2007 et 2000$ pour les années subséquentes n’excédant pas une période de 100 ans conformément à l’article 1197 du Code civil du Québec.»
Or, note le sous-ministre, «le 6 mai 2002, la Ville a renoncé à la contribution du Château pour les coûts de construction de la passerelle qui ont été finalement assumés par l’administration municipale. La Ville et le Château se sont plutôt
entendus afin que le loyer emphytéotique initialement prévu soit majoré. Cette majoration ne couvrait toutefois qu’une partie des coûts de construction de la passerelle que le Château n’avait pas déboursés. Cette emphytéose a été signée le 9 juillet 2002, en même temps qu’un bail par lequel le Château louait la passerelle à la Ville pour une somme de 1 000$ par an.»
Le rapport blâme clairement la municipalité : «Les services spécialisés du Ministère m’indiquent que la modification précitée n’est pas la seule qui a été réalisée par l’administration municipale afin de réduire la somme des créances dues par le Château. En effet, en fonction des informations obtenues, le conseil municipal a décidé de modifier, en faveur de l’entreprise, les conditions financières prévues aux ententes originales à plusieurs reprises, et ce, durant la période s’échelonnant de 2002 à 2013. Selon nos estimations, la Ville aurait ainsi renoncé à une somme d’environ 500 000$ lorsqu’elle a successivement allégé les termes financiers prévus à l’origine, et ce, sans justification autre que celle d’octroyer une aide à l’entreprise. Pourtant, l’article 1 de la Loi sur l’interdiction de subventions municipales (LISM) prévoit qu’«...aucune municipalité ne peut, ni directement, ni indirectement, venir en aide à un établissement industriel ou commercial, autrement que de la façon prévue à la Loi sur les immeubles industriels municipaux...»
Le rapport en déduit donc que «les décisions de la Ville pourraient constituer une forme d’aide interdite en vertu de la LISM. Cependant, seul un juge dispose de l’autorité pour statuer quant à la nullité de ces décisions».
De plus, selon le rapport, «par un report de paiement d’un montant supérieur à 700 000$, la Ville a renoncé aux mécanismes légaux de recouvrement des taxes municipales dues par le Château. Bien qu’elle ait inscrit des hypothèques légales sur une partie de ces créances, la Ville se prive néanmoins d’une somme importante
en permettant à l’entreprise d’étaler le remboursement de cette dette sur plusieurs années. Par ailleurs, les renseignements dont dispose le Ministère démontrent que les mandats d’audit des états financiers de l’administration municipale ont été octroyés à des firmes liées au premier actionnaire du Château. À ce sujet, il serait opportun de vous enquérir auprès de l’auditeur des actions prises par celui-ci pour s’assurer de son indépendance dans la réalisation de ses mandats auprès de la Ville de Maniwaki.»
Les éléments qui découlent de l’enquête du ministère «pourront être soumis aux instances appropriées afin qu’elles déterminent de l’opportunité des suites à donner à ce dossier».
Enfin, le rapport précise que «la Ville avait été avisée par le Ministère à l’été 2012, qu’elle ne pouvait annuler les créances dues par le Château. Or, aucun correctif à la situation ne semble avoir été apporté à la suite de l’intervention du Ministère. Il appartient donc désormais à la Ville de Maniwaki de prendre les mesures nécessaires afin de respecter la Loi sur l’interdiction de subventions municipales.»
Il aura fallu attendre plus d’un an pour que sorte ce rapport. Entre temps, le maire Robert Coulombe, qui a toujours affirmé avoir agi en conformité avec la loi, a été réélu avec une forte majorité. Par ailleurs, une équipe d’enquêteurs de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) est venue à l’hôtel de ville en juillet dernier. Elle est repartie avec des documents en lien avec le dossier du Château Logue. Les conclusions de cette enquête sont toujours attendues.
À noter que le rapport du MAMROT est disponible sur son site Internet à l’adresse suivante : http://www.mamrot. gouv.qc.ca/gestion-contractuelle-et- ethique/rapports-de-verification-et- plaintes/plaintes/
Sylvie Dejouy
Réaction du maire :
«Nous voulions sauver les emplois»
MANIWAKI - Après lecture du rapport lors de la réunion du conseil, le maire Robert Coulombe a remis un communiqué, précisant qu’il n’émettra aucun autre commentaire pour le moment.
Selon lui, la Ville avait le choix entre deux options dans ce dossier : «Refuser toute négociation et ainsi provoquer la fermeture du Centre Château Logue inc. et la perte de 40 emplois ; négocier avec le Château Logue pour ultimement lui permettre de poursuivre ses activités, maintenir les emplois des employés et limiter les pertes que la Ville était susceptible d’encourir advenant la faillite du Château. Dans ce contexte, soit préserver les emplois, permettre au Château Logue d’acquitter les aréages de taxes foncières et régler le litige, la Ville a conclu
le 12 octobre 2012 une entente avec le Château Logue.»
Pour sa défense, Robert Coulombe précise que la Ville a agi selon un avis juridique qu’elle avait obtenu. Or, «il n’y a eu aucune vérification ou discussion entre la Ville et le MAMROT sur l’avis juridique de Me Michel Lafrenière, produit en 2012. Cet avis juridique a conseillé le conseil municipal dans sa décision unanime des 7 membres du conseil. Les ententes qui ont été conclues entre la Ville et le Château Logue entre 2002 et 2013 avaient pour but de préserver les emplois et non de venir en aide à leurs propriétaires».
Robert Coulombe assure que le Château Logue respecte les engagements pris en 2012 concernant les taxes municipales, soit de verser un montant mensuel qui se situe
actuellement à 15 000$.
Cependant, il ajoute que «concernant l’audit des états financiers de la Ville, nous allons aller en appel d’offres pour la production des états financiers 2013 et demander au MAMROT un délai dans la production de ceux-ci dû au fait que nous sommes à deux mois de la date limite du 30 avril 2014.» Jusqu’ici, la vérification des états financiers de la Ville était confiée à la firme comptable de Michel Lacroix, premier actionnaire du Château Logue.
En conclusion, Robert Coulombe précise qu’après discussions avec le procureur de la Ville, une rencontre sera demandée avec les représentants du MAMROT.
Sylvie Dejouy


































































































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