Page 6 - La Gatineau 20 novembre 2014
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6 20 novembre 2014 La Gatineau PARTAGE DES RESSOURCES
Rencontre avec les compagnies et MRC
SYLVIE DEJOUY
sdejouy@lagatineau.com
KITIGAN ZIBI ANISHINABE - Le Chef Gilbert W. Whiteduck a convoqué, début novembre, une réunion avec les compagnies forestières de la région et les MRC occupant le territoire traditionnel de Kitigan Zibi Anishinabeg. Les MRC présentes étaient celles de la Vallée-de-la- Gatineau, du Pontiac, Des Collines-de- l’Outaouais, des Laurentides et d’Antoine- Labelle. Il y avait 24 participants.
Le but de la rencontre était de discuter des implications de la décision Tsilqot’in en Colombie Britannique sur les communautés locales outaouaises et laurentiennes. La cause Tsilqot’in, du nom de la communauté amériendienne concernée, a été gagnée devant la Cour suprême, qui a reconnu sur une partie de leur territoire les droits ancestraux. «Cette décision vient toucher presque tout le Québec,» explique Gilbert Witheduck.
Le Chef Witheduck a décrit, aux personnes présentes à la réunion, le concept du titre aborigène et comment les compagnies forestières et les communautés locales allochtones et autochtones peuvent travailler ensemble afin d’éviter le conflit. Les demandes de la communauté incluent un partage des revenus découlant de
l’extraction des ressources naturelles du territoire, une plus grande implication dans la protection environnementale, un mécanisme pour développer une harmonie entre les occupants algonquins et les autres usagers et le développement d’un protocole à long terme sur l’usage du territoire traditionnel.
«Est-ce qu’ils sont prêts à développer avec nous un partage des ressources, questionne Gilbert Witheduck. Ils m’ont apporté la problématique de l’industrie du bois et le fait qu’ils ne sont plus dans la position de faire des planifications à long terme car c’est contrôlé par le gouvernement du Québec. Alors quand on leur dit on veut s’assoir avec vous pour faire cette planification, pour harmoniser les choses et qu’on aient des bénéfices directs, ils disent que la réforme de la forêt a eu un impact tellement fort que c’est une pierre angulaire du grand débat si on ne peut pas planifier.»
Personne ne s’est prononcé pour le moment. Il y a déjà une entente avec Produits forestiers Résolu qui stipule que pour chaque mètre de bois coupé, une redevance est versée à la communauté. Le Chef voudrait que ce soit la même chose pour toutes les compagnies.
À l’issue de la rencontre, il a été décidé qu’une lettre conjointe va être préparée. Le Chef espère y voir une ouverture des MRC
▲ Le Chef Gilbert W. Whiteduck a convoqué, début novembre, une réunion avec les compagnies forestières de la région et les MRC occupant le territoire traditionnel de Kitigan Zibi Anishinabeg. Le but était de discuter des implications de la décision Tsilqot’in en Colombie Britannique sur les communautés locales outaouaises et laurentiennes.
Offre en échange d’abandonner des revendications de territoire
KITIGAN ZIBI ANISHINABE - Le gouvernement canadien a fait dernièrement une offre financière à Kitigan Zibi, en échange d’abandonner les revendications de territoires sur 363 acres.
«Quand la communauté a été créée en 1853, ses limites allaient jusqu’à la rivière Désert, explique le Chef Witheduck. Vers la fin des années 1800, il y avait des agents fédéraux, nous on les appelle des agents
indiens, qui, de toute sorte de façon, ont pris nos territoires. Par exemple près du centre d’achat il y avait la maison du pre- mier chef.»
Cela a pris plus de 25 ans à la commu- nauté pour rassembler des preuves. Le gou- vernement fédéral, dans le cadre de la poli- tique sur les revendications particulières, a fait dernièrement une offre à la commu- nauté. Celle-ci ne veut pas dévoiler le
montant.
«Mais la cause Tsilqot’in indique qu’une Première nation ne peut pas éteindre ses droits, explique Gilbert Witheduck. Alors que la politique de revendications particu- lières oblige, si la communauté accepte l’offre, d’éteindre ses droits.»
Les discussions vont maintenant se faire au sein de la communauté afin de prendre une décision. Un référendum pourrait
même être organisé.
Si elle n’accepte par l’offre, la commu- nauté a plusieurs options : aller devant un tribunal sur les revendications particulières et essayer de prouver que l’offre n’est pas assez élevée ; aller devant la Cour fédérale pour essayer de démontrer que l’offre n’est pas assez élevée et que des lots devraient revenir à la communauté ; tout laisser de côté et continuer à en discuter.
une femme.»
Parmi les trois candidats, Gilbert Witheduck n’affiche pas de préférence : «Je vais être à l’écoute. Je vais voir aussi s’il y a des gens de la communauté qui ont des recom- mandations, car ce sont seulement les chefs qui ont le droit de vote.»
Une fois élu, le Chef national n’a aucun pouvoir comme tel. «Il nous représente, explique Gilbert Witheduck. Il ne peut pas signer d’entente, il ne peut pas s’engager à rien sans le consentement des chefs.»
Le juge pourrait décider que le non autoch- tone va avoir accès à la maison et que l’Al- gonquin parte. On essaye de prendre cela en considération pour protéger l’intégrité de notre territoire.»
À noter que c’est la première fois que la communauté a le droit de préparer une loi, sans consentement du ministre des Affaires indiennes. Il suffit d’un référendum au sein de la communauté.
Élection du Chef national le 10 décembre
KITIGAN ZIBI ANISHINABE - Le 10 décembre aura lieu l’élection du Chef national de l’Assemblée des Premières nations. Le siège était vacant depuis la démission de l’an- cien chef national Shawn Atleo en mai der- nier, suite aux critiques de certains chefs qui l’ont accusé d’être trop proche du gouverne- ment conservateur : il avait défendu publique- ment la loi sur le contrôle par les Premières nations de leur propre éducation.
Il y a trois candidats : Ghyslain Picard, qui était le chef régional de l’Assemblée des
Premières nations pour le Québec et Terre- Neuve-et-Labrador ; Perry Bellegarde, qui est actuellement le chef de la Fédération des nations autochtones de la Saskatchewan ; Leon Jourdain, l’ancien chef de la Première nation de Lac-la-Croix, dans le nord-ouest de l’Ontario.
Pendant que Ghyslain Picard est en cam- pagne, quatre chefs, dont Gilbert Witheduck, ont pris chacun une partie de ses responsabi- lités. S’il est élu Chef national, il faudra élire en janvier le nouveau chef régional du Québec.
Le chef de Kitigan Zibi pourrait alors se por- ter candidat : «Je suis ouvert, je n’ai pas pris de décision, il y a une possibilité», avoue-t-il.
Concernant les candidats au poste de Chef national, Gilbert Witheduck regrette tout d’abord qu’il n’y ait pas de femme candidate. «La grande majorité des chefs sont des hommes qui ne sont pas prêts à élire une femme, commente-t-il. Moi je n’ai jamais pensé comme ça. J’écoute le candidat ou la candidate, je vais voir leur expérience et je vais voter sur ça, que ce soit un homme ou
Justice : deux projets à l’étude
KITIGAN ZIBI ANISHINABE - Actuellement, la communauté travaille sur un projet pour que, si certains de ses membres se retrouvent devant les tribunaux, la communauté soit impliquée. «Cela se fait dans d’autres provinces, explique Gilbert Witheduck. Il s’agit de créer un cercle dans la communauté dans lequel il y aura des aînés, trois à quatre personnes seulement. Si la personne accusée est prête à aller rencontrer les membres du cercle et à accepter leurs
décisions, elle ne serait pas obligée de se présenter devant les tribunaux. Ou on pourrait travailler avec le juge, il pourrait écouter les recommandations des aînés.»
Cela concernerait par exemple les cas de vols, pas les causes très graves comme un meurtre. L’objectif est d’éviter que les membres de la communauté tombent dans le système judiciaire et récidivent. «Ils ont une méconnaissance de comment le tribu- nal fonctionne, se retrouvent en prison six mois, trois mois, commente le Chef
Witheduck. On veut intervenir très tôt, quitte à ce que la personne évite d’avoir un casier judiciaire.
Par ailleurs, suite à l’adoption de la loi sur les biens patrimoniaux, qui sera effec- tive au Canada le 17 décembre, la commu- nauté travaille sur le développement de sa propre loi. «La grande complexité en arrière de tout ça, c’est s’il y a par exemple un couple avec un Anishinabe de Kitigan Zibi et une non autochtone, qu’ils construisent une maison puis se séparent.
et des compagnies de travailler de façon différente avec la communauté. «Comme je leur disais, si vous en tant qu’industrie vous n’êtes pas prêts tout de suite à faire quelque chose, c’est votre décision. Mais
rappelez-vous que lorsqu’on se présentera devant la Cour suprême, si on gagne notre cause on va pouvoir retourner en arrière en disant qu’on leur avait donné une chance de partager un peu les revenus.»


































































































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