Page 15 - La Gatineau 8 octobre 2015
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La Gatineau 8 octobre 2015 15 L’austérité serait-elle misogyne ?
MARCHE MONDIALE DES FEMMES
DANY OUELLET
douellet@lagatineau.com
MANIWAKI - Mercredi 30 septembre, un groupe de femmes définitivement engagées a effectué un bref mais coloré passage à Maniwaki. Il s’agit d’une caravane assurant la mobilisation auprès des regroupements de femmes d’un bout à l’autre du Québec, dans le cadre de la Marche mondiale des femmes qui aura lieu à Trois-Rivières le 17 octobre prochain.
Danielle Beaudry, directrice générale de l’ASEC, l’Association de solidarité et d’entraide communautaire de la Haute- Gatineau, et fondatrice du Comité femme Vallée-de-la-Gatineau, était là pour accueillir cette caravane appelant les femmes à la résistance et à la solidarité. La caravane, arrivée à midi et demi dans le stationnement des Galeries de Maniwaki, fut saluée par des militantes bruyantes, une quinzaine de femmes de la Vallée-de-la-Gatineau, représentantes d’organismes communautaires et de soutien aux femmes et à la population.
La Marche mondiale des femmes a pour thème «Libérons nos cœurs, nos terres et nos territoires». Au Québec plus spécifiquement, les sujets de revendication ciblés par les femmes sont l’austérité, parce que nous la vivons maintenant ; l’environnement, pour l’importance qu’il a et la nécessité de le protéger ; la militarisation, car les politiques canadiennes sont plus agressives sur le plan international et le pays participe activement aux opérations de combat dans différents conflits, plus qu’auparavant quand il se faisait le protecteur de la paix dans le monde.
Les propos recueillis ce mercredi midi autour de cette caravane étaient assez unanimes : l’austérité a plus d’impact sur les femmes. Elle porte notamment atteinte aux femmes pour le logement. Citons en exemple le cas de femmes monoparentales sur l’aide sociale qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts une fois le logement et les comptes payés.
Même le salaire minimum est insuffisant pour une famille monoparentale. Ainsi, une mère avec deux enfants pourrait se voir forcée d’abandonner son travail en raison de la hausse des frais de garde car elle ne pourrait plus se permettre de les payer et devrait en conséquence demeurer à la maison pour s’occuper des enfants. «Il y a un réel besoin de logements sociaux, mais ceux qui sont construits ce sont seulement des condos», s’indigne une militante présente.
Lucie et Carole, intervenantes clinique et communautaire, espèrent voir un changement s’effectuer dans la société, surtout au niveau de la condition des femmes. La marche du 17 octobre sert à mettre de la pression sur le gouvernement. Elles trouvent important de participer à la défense des droits des femmes.
Pour Maude, intervenante au CALACS, le Comité femme Vallée-de-la-Gatineau a choisi l’austérité, parce que conscient que les coupures touchent particulièrement les femmes dans la Vallée-de-la-Gatineau. D’ailleurs, beaucoup de femmes travaillent dans les organismes communautaires et subissent ainsi plus de pertes d’emplois. Les mesures d’austérité et la poursuite du déficit zéro sont souvent un prétexte pour couper dans les services à la population, dont plusieurs sont fournis par les réseaux
▲ Beaucoup de préoccupations autour du coût de la vie qui augmente tandis que les salaires eux n’augmentent pas.
communautaires. Ces organismes sont sérieusement affectés et doivent mettre des travailleurs à pieds, ce qui diminue la qualité des réseaux d’aide et de service.
Chantale Locas, co-porte parole de la tournée, explique le trajet de l’aventure dans laquelle elle s’est embarquée et qui la mènera littéralement d’un bout à l’autre du Québec : de l’Abitibi à la Gaspésie, à peu près toutes les régions seront visitées. La caravane s’est mise en branle le 24 septembre et son périple se terminera le 17 octobre à Trois-Rivières pour la Marche mondiale des femmes. La caravane vise également à prendre conscience de la réalité et des enjeux des femmes en région. Enseignante à la retraite, Chantale Locas insiste en précisant qu’elle connait bien le système d’éducation et que couper plus encore dans ce réseau va créer des impacts directs sur les élèves, leur nutrition ainsi que leur santé mentale. Par ailleurs, elle dit ne pas du tout croire le gouvernement quand il affirme que ses politiques d’austérité n’affecteront pas les services à la population.
Chantale Locas surenchérit en pointant du doigt le fédéral avec sa réforme de l’assurance emploi. Le salaire minimum n’augmente pas mais les frais eux ne cessent d’augmenter pour les services et les produits de base. Le Québec, selon elle, est bâti sur des valeurs plus humanitaires que ce qui a cours en ce moment, la course aux profits faisant force de loi.
Le Premier ministre du Québec, Philippe Couillard, ne réalise pas ce que les mesures d’austérité font à la population, lui qui n’est pas sur le terrain pour le constater de ses yeux. Les gouvernements utilisent des subterfuges pour réduire les transferts vers la population, en citant en exemple le crédit de solidarité, ou encore la réforme de l’aide sociale, qui semblent plus axés sur le bâton que la carotte. La privatisation des services médicaux a aussi un plus grand impact sur les femmes parce qu’elles utilisent le système de santé plus souvent.
Mélanie Sarrasin, femme de l’Outaouais nouvellement élue présidente de la Fédération des Femmes du Québec, mentionne qu’en général la condition des femmes stagne et il y a même des acquis issus de longues luttes féministes qui pourraient être remis en question, comme le droit à l’avortement selon un projet de loi des conservateurs qui lorgne à l’horizon. Elle précise toutefois que la condition économique des femmes se détériore sous un régime d’austérité et rappelle que le salaire des femmes équivaut encore à 75% de celui des hommes.
De dix mille à quinze mille personnes
sont attendues à Trois-Rivières le 17 octobre, dont une délégation de la région. Compte tenu des impacts directs que les mesures ont sur les femmes, il est important de tenir ce genre de mobilisation selon elle Mélanie Sarrasin
À cette description de l’ampleur du fardeau qui est imposé aux femmes dans l’application des politiques d’austérité du gouvernement québécois et de sa volonté d’atteindre ses objectifs d’équilibre budgétaire à tout prix, il est difficile de ne pas y voir une forme d’agression, non pas physique mais d’ordre économique, sûrement aussi dévastatrice sur le morale et la santé de mères qui peinent à chaque jour pour arriver à conserver à bout de bras l’équilibre d’une famille qui, trop souvent, dépend entièrement d’elles.
▲ Triangleapportéparlesgroupesdefemmesde l’Outaouais arborant des obstacles, comme la pauvreté ou la violence, qui se dressent dans la vie des femmes et les alternatives proposées.


































































































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