Page 5 - La Gatineau 29 octobre 2015
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LA MAISON D’HÉBERGEMENT WASEYA Un refuge pour les
victimes de violence
La Gatineau 29 octobre 2015 5
SYLVIE DEJOUY
sdejouy@lagatineau.com
KITIGAN ZIBI ANISHINABEG - Il aura fallu le témoignage de 12 présumées victimes, à Val d’Or, dénonçant devant les caméras des agressions sexuelles et abus de pouvoir qui auraient été commis par 8 policiers de la Sûreté du Québec, pour que toutes les lumières se tournent vers le problème de violence dont sont victimes des femmes autochtones. Certes, cette problématique ne touche pas exclusivement les Premières Nations. Mais dans ce cas-ci, comme dans bien d’autres, les agresseurs auraient profité de la vulnérabilité des femmes autochtones.
Sur le terrain, à Kitigan Zibi, des services ont été mis en place pour venir en aide aux membres de la communauté qui font face à de la violence. Il y a notamment la maison d’hébergement pour femmes Waseya, qui fêtera en mars prochain son 25e anniversaire. Trois personnes y sont employées, dont Sue Thran et Lynn Buckshot, conseillères. Cette dernière fait partie des gens qui ont créé la maison. Au fil des années, le centre s’est fait de plus en plus connaître et les demandes ont augmenté. «Nous accueillons des femmes qui vivent de la violence familiale, avec ou sans enfants, de la nation algonquine, expliquent les deux femmes. Nous desservons les neuf communautés algonquines. On peut accueillir trois familles.»
Les victimes viennent d’elles-mêmes ou sont référées par les personnes de première ligne comme les policiers ou des professionnels de la santé. Elles peuvent rester ici de un jour à deux mois. Certaines repartent et reviennent.
La maison, décorée dans un style chaleureux, comprend tout le confort nécessaire pour les femmes accueillies et leurs enfants : une salle de jeu, un salon, une cuisine, une grande cour extérieure, les chambres ont toutes leur propre salle de bain. Il y a aussi une friperie, garnie de dons, pour fournir aux familles tout ce dont elles ont besoin.
Ici, les femmes font une halte le temps de retrouver leurs repères et se ressourcer, bien qu’il soit paradoxale que ce soit à elles de
quitter leur maison, leur communauté. «La première raison pour laquelle elles viennent ici, c’est leur sécurité, expliquent Sue Thran et Lynn Buckshot. Ensuite, on s’adapte à leurs besoins. Nous essayons de tisser des liens en les accompagnant quotidiennement et de leur redonner le pouvoir, qu’elles prennent elles- mêmes leurs décisions et reprennent le contrôle de leur vie. Certaines à qui on demande ce qu’elles veulent manger ou faire aujourd’hui ne savent pas quoi répondre. Progressivement, on fait des petits pas.»
Les personnes accueillies peuvent aussi demander de l’aide pour trouver les ressources dont elles ont besoin, emménager dans un appartement, etc. Mais pas question pour les conseillères de les forcer : «Les services que nous offrons dépendent de leurs besoins. Nous les encourageons à faire les choses par elles- mêmes et s’il y a des obstacles, comme par exemple un propriétaire qui ne voulait pas louer son appartement car il s’agissait d’une Autochtone, nous intervenons pour les aider.»
Sue Thran et Lynn Buckshot expliquent qu’un travail doit aussi être fait avec les hommes : «Nous ne sommes pas là pour les juger, nous travaillons pour le bien de la famille. Nous incitons les femmes à nous appeler avant qu’il y ait une crise, quand elles sentent que la tension monte, par mesure préventive. Nous travaillons avec les familles pour prévenir la violence.»
Alors que l’organisme Femmes autochtones du Québec indique que plus de 80 % d’entre elles sont agressées, dernièrement le gouvernement québécois a annoncé qu’il se penchera sur la question de la violence à l’égard des femmes autochtones : la Commission des relations avec les citoyens se donne un mandat d’initiative pour étudier leurs conditions de vie relativement aux agressions sexuelles et à la violence conjugale. Les activités de la commission parlementaire pourraient débuter avant Noël. Quant au nouveau gouvernement fédéral libéral, les intervenantes de la Maison Waseya espèrent qu’il tiendra les promesses faites durant la campagne électorale.
▲ Lynn Buckshot et Sue Thran son conseillères à la maison d’hébergement pour femmes Waseya. Elles apportent du soutien aux victimes de violence familiale.


































































































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