Page 5 - La Gatineau 27 novembre 2014
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AUSTÉRITÉ Réactions
d’organismes du milieu
SYLVIE DEJOUY
sdejouy@lagatineau.com
LA GATINEAU - Quels seront les impacts des réformes gouvernementales dans la Vallée-de-la-Gatineau ? Nous avons demandé à des responsables d’or- ganismes ce qu’ils pensent des mesures d’austérité et quelles seront les possibles conséquences sur leurs organisations.
La Gatineau 27 novembre 2014 5 «Créer l’incertitude n’a rien de bon»
LA GATINEAU - L’Union des producteurs agricoles de la région Outaouais-Laurentides se dit très préoccupée par le climat d’incertitude créé par le gouvernement provincial : «De toute évidence, les récentes informations émanant de la colline parlementaire n’ont que pour résultat de générer l’inquiétude au sein de la communauté agricole et du monde rural.»
Selon le président de l’UPA Outaouais- Laurentides, Richard Maheu, «même si Québec tente d’être rassurant pour le secteur agroalimentaire, nous espérons que le ministre de l’Agriculture pourra influencer son gouvernement afin qu’il préserve le support indispensable de l’État envers nos producteurs. L’insécurité qui plane sur le monde agricole pourrait avoir des impacts
désastreux sur les décisions d’investissement des entreprises agricoles. Il serait irresponsable de jouer ainsi avec l’économie de nos régions».
La volatilité des marchés, les
risques climatiques et les maladies
sont inhérents au secteur agricole,
et ce, partout dans le monde.
L’UPA rappelle que «tous les pays
développés apportent un soutien
à leur agriculture. Or, les plus
récentes données démontrent que
le soutien accordé aux agriculteurs québécois est plus bas que celui des pays de l’OCDE, malgré les prétentions de la commission de révision des programmes».
L’agriculture joue un rôle économique de
premier plan dans le développement du Québec et de ses régions. En 2013, l’agriculture et la transformation alimentaire ont, en effet, généré près de 200 000 emplois, soit un emploi sur 20 au Québec. Elles ont engendré plus de 17 G$ de PIB, représentant 5,9 % du PIB québécois. Elles ont aussi apporté plus de 4,5 G$ aux revenus des divers paliers le gouvernement.
«Les producteurs agricoles sont des entrepreneurs qui prennent leurs décisions d’investissement sur la base des risques qu’ils rencontrent, conclut Richard Maheu. Le ministre de l’Agriculture doit agir et démontrer
qu’il sert les intérêts du monde agricole».
nos groupes n’existera plus. On s’en ira aussi vers la privatisation avec des ententes de services.»
Dans ce contexte, Danielle Beaudry déplore que la mobilisation ne soit pas plus importante dans la région : «J’entends des gens dire, j’en ai pas de problème. Mais peut- être que ton voisin en a. Si les commerçants, les élus, les citoyens qui ne vivent pas de problèmes, ne se mobilisent pas avec nous, il va y avoir un impact sur eux aussi. Dans les années 60-70, quand les gens sont sortis dans les rues pour avoir des services publics et des programmes sociaux, c’était solidaire, tout le monde ensemble. Il faut retrouver ça car si les gens ne bougent pas ils vont perdre beaucoup de services et être encore plus démunis.»
socio-communautaires. Notre clientèle est moins nantie, fragile. Quand on vient couper dans des programmes comme «Pass-Action», il n’y a pas d’autre alternative. Ce programme nous aide à les retenir et à développer leur autonomie. C’est une atteinte directe à la personne, à son intégrité. Cela affectera aussi leurs familles. Il y a des moyens d’économiser mais la façon de faire nous semble injuste par rapport à certains programmes et certaines clientèles.»
En résumé, le directeur de Jean Bosco se pose beaucoup de questions : «Où est-ce qu’on s’en va ? Les questions sans réponses engendrent des craintes.»
ouvert d’esprit en ce qui a trait aux réactions des citoyens». L’organisation souhaite «que le gouvernement fasse preuve de bonne volonté et s’avère plus judicieux dans ses choix».
La SNQHR assure percevoir «l’irritation, voire la panique, dans la population. Un mouvement s’élève présentement pour préserver de la destruction les structures économiques et sociales que les Québécois ont durement acquises, pour lesquelles ils ont payé et qui reflètent leur choix de société». C’est pourquoi la SNQ des Hautes-Rivières encourage les gens à communiquer leur mécontentement. Elle en profite d’ailleurs pour inviter la population à participer en grand nombre aux importantes manifestations citoyennes «Refusons l’austérité!» qui se dérouleront simultanément le samedi 29 novembre prochain dès 13h à Montréal (Place du Canada) et à Québec (Parc des Champs-de-Bataille).
▲ Richard Maheu, président de l’UPA Outaouais-Laurentides.
«Il faut que la région se mobilise plus»
LA GATINEAU - Danielle Beaudry, coordonnatrice de l’Association de solidarité et d’entraide communautaire (ASEC) Haute- Gatineau, en est convaincue : «On s’en va vers quelque chose d’impensable avec ces mesures d’austérité et les coupures dans les organismes communautaires. S’il n’y a plus de services, d’emplois, de programmes sociaux gérés ici dans la Vallée-de-la-Gatineau, les gens vont s’en aller dans les grands centres. La Vallée- de-la-Gatineau va devenir une sorte de ville fantôme où l’économie ne pourra plus rouler. On va vivre de la pauvreté immense.»
L’ASEC, organisme de défense collective des droits, n’a pas encore eu son protocole signé par le gouvernement. «Tant et aussi longtemps qu’il n’est pas signé, on ne peut pas
recevoir notre subvention,
explique Danielle Beaudry. On
commence à manquer d’argent.
Est-ce qu’il va falloir mettre la
clé sous la porte pour un certain
temps ? On ne sait pas et c’est la
réalité de plein d’organismes communautaires. On manque
de subventions, on manque de
personnel. On passe pour des
chialeux. Or, les organismes de
défense des droits humains
travaillent au niveau des besoins fondamentaux. C’est nous qui
nous assurons que le gouvernement respecte les droits acquis.»
Par ailleurs, quand le ministre François
Blais signera le protocole, il ne sera valable que pour six mois. «Dans 18 mois on se retrouvera donc dans le même cercle vicieux d’attente de protocole, poursuit Danielle Beaudry. En plus, ils veulent changer la mission des groupes de défense des droits. On s’entend qu’on est dans leurs pattes. Alors est-ce qu’ils vont faire en sorte que les groupes de défense des droits vont devenir des groupes de services, vont avoir leurs sous sur des soumissions de projets, ne seront plus autonomes.
C’est la réalité d’autres organismes communautaires. Il faudra soumettre des projets pour avoir des sous et l’autonomie de
l’urbain ? Le clivage entre les régions existe, entre le rural et l’urbain aussi. On n’a aucune réponse à ces questions et le temps file.»
Autre préoccupation : quelle place la clientèle de Jean Bosco va-t-elle occuper dans ces réformes ?
«Est-ce qu’ils vont recevoir tous les services qui leur sont dûs, questionne Khélil Hamitouche.
C’est ce qui nous préoccupe et je pense que ce sentiment est partagé par tous les acteurs
«On se demande où on s’en va ?»
LA GATINEAU - Même si rien n’est encore officiel, le directeur du Centre Jean Bosco, Khélil Hamitouche, ne cache pas son inquiétude : «Il y a eu des communications mais ce n’est pas encore clair. Donc la perception que nous avons pour le moment, c’est un recul dans les prérogatives de base que le gouvernement doit occuper.»
Khélil Hamitouche rappelle que les impacts en région ne seront pas les mêmes que dans les grandes métropoles et le gouvernement ne semble pas en tenir compte : «Comme les ressources sont très limitées ici, on met encore plus de pression sur les familles.»
Pour ce qui concerne plus précisément le Centre Jean
Bosco, le gros point d’interrogation concerne la
récurrence du financement. «Ils
ont réitéré leur engagement
envers notre institution, explique
le directeur. Mais après le 31
mars, qu’est-ce qu’il se passe ?
Qui va chapeauter le volet socio- communautaire ? Est-ce que ma
clientèle va être morcelée selon
les ministères et est-ce que ça va
être pareil pour le financement ? Est-ce qu’il va y avoir une déséquilibre par rapport à
▲ Danielle Beaudry, coordonnatrice de l’Association de solidarité et d’entraide communautaire.
«Des mesures d’austérité sans précédent»
LA GATINEAU - La Société nationale des Québécoises et Québécois des Hautes- Rivières tient à exprimer son désarroi et à dénoncer les mesures d’austérité qu’elle juge sans précédent, déployées par le gouvernement de Philippe Couillard.
Selon la SNQHR, «bien que ce dernier ait mené une campagne électorale axée sur le développement du Québec et la création d’emplois, il entreprend aujourd’hui un véritable démantèlement de l’État social du Québec en prévoyant sabrer pas moins de 5 milliards de dollars dans les services publics et les programmes sociaux au cours des deux prochaines années. Chaque jour, les effets des coupes s’étalent dans les médias. Ces compressions touchent directement l’accessibilité et la qualité des services à la population dans la santé, les services sociaux et l’éducation.»
La SNQHR estime que «le gouvernement n’y est pas allé de
main morte avec les diverses
agences de concertation régionales
les plus essentielles à la société.
Par exemple, rappelons que les Conférences régionales des élus
(CRÉ), les centres locaux de développement (CLD), les
carrefours jeunesse-emploi (CJE),
les centres de la petite enfance
(CPE) et les commissions scolaires
sont parmi ceux qui ont subi les
élans du gouvernement Couillard
à ce jour. C’est à faire frémir que d’imaginer quels seront les prochains...»
Selon la SNQHR, «ces mesures sont un désastre, alors qu’elles entraînent notamment une perte de plus de 21 000 emplois au Québec en 2014. De plus, ces décisions d’ordre purement économique impliquent des
répercussions à plusieurs échelles dans les régions, particulièrement dans celles comme la nôtre.»
«En effet, le principe d’occupation du territoire prend tout son sens lorsque des outils sont mis en place afin de veiller à la rétention des citoyens en région et d’en attirer de nouveaux, de
préciser Richard Gagnon, président de la SNQHR. Une nation en santé et fonctionnelle ne peut persister et se développer lorsqu’on met la hache dans les
richesses qu’elle a su développer. L’austérité est un choix, non une fatalité.»
La Société nationale suggère au gouvernement «de revoir ses récentes décisions, d’évaluer sérieusement les conséquences de celles-ci et de se montrer
▲ Khélil Hamitouche, directeur du Centre Jean Bosco.
▲ Sonia Lortie, directrice générale de la Société nationale des Québécoises et Québécois des Hautes-Rivières.


































































































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