Page 7 - La Gatineau 12 novembre 2015
P. 7

La Gatineau 12 novembre 2015 7 Manifestation à venir devant la DPJ
ENFANTS AUTOCHTONES PLACÉS
SYLVIE DEJOUY
sdejouy@lagatineau.com
LA GATINEAU - «On voudrait avoir nos enfants pour Noël.» Kevin Decoursax et Angie Maranda, couple qui vit à Lac Rapide, ont cinq enfants âgés de 4, 6, 11, 14 et 17 ans. Tous ont été placés dans des familles d’accueil, depuis presque six ans, à l’origine à cause de consommation d’alcool et de violence conjugale dans le foyer. Aujourd’hui, ils souhaiteraient récupérer leur garde. Avec plusieurs familles de la communauté qui vivent la même problématique, ils ont décidé d’organiser une manifestation dans les prochains jours devant les bureaux de la Direction de la protection de la jeunesse, à Maniwaki.
Tous les deux reprochent d’abord le fait que leurs enfants sont placés dans des familles d’accueil différentes et non autochtones. Il n’y a que celui de 17 ans qui vit chez sa tante. «On avait pourtant donné au travailleur social des noms de familles de Lac Rapide ayant une bonne vie, assure le couple. Trois des enfants ne savent plus parler l’algonquin. Le plus jeune n’a pas pu l’apprendre, il ne sait plus qui est sa mère et la famille d’accueil a changé son nom. Ils ne baignent pas dans leurs traditions. Dans notre culture, nous avons une manière différente d’élever les enfants.»
Le couple se plaint par ailleurs des conditions de visite : «Nous les voyons pendant une heure, deux fois par mois, au centre de jeunesse à Maniwaki, dans une petite pièce sous la supervision d’un employé de la DPJ. On essaye de ne manquer aucune visite mais moi (Kevin Decoursax) je suis responsable du générateur à Lac Rapide. Je suis le seul à pouvoir m’en occuper. En cas de panne, je ne peux pas venir à la visite mais c’est quand même mis dans mon dossier. Parfois notre jour de visite est changé. Par
▲ Kevin Decoursax et Angie Maranda entourent Kathleen Cayer, intervenante à Lac Rapide et certifiée en défense des droits des personnes, qui les aide dans leurs démarches depuis six ans.
exemple, le soir d’Halloween on devait les voir mais ça a été annulé. Les enfants ne sont pas toujours tous là, cela dépend des disponibilités des familles d’accueil. Depuis qu’ils sont placés, nous n’avons jamais eu de réunion de famille. Nous n’avons pas pu les avoir pour la fête de leur grand-mère.»
Le couple est aidé dans ses démarches par Kathleen Cayer, intervenante à Lac Rapide et à la maison d’hébergement pour victimes de violence familiale, la Maison Waseya, à Kitigan Zibi. Elle est également certifiée par le Centre des droits des personnes de l’université d’Ottawa et
représente les peuples autochtones pour la défense de leurs droits. Selon elle, le père des enfants «a pris toutes les mesures qui lui étaient demandées depuis six ans que je les suis, comme arrêter de consommer ou aller en thérapie. Mais la DPJ ne le prend pas en considération et ce n’est jamais assez. Il est allé de lui-même à Impact mais l’image d’un homme violent reste toujours malgré les efforts».
Le 2 décembre, le couple devra aller au palais de justice de Maniwaki «pour renoncer à nos droits sur notre fils aîné. Mais on ne veut pas et on a peur qu’on nous demande la même chose pour les autres».
Selon Kathleen Cayer, «à Lac Rapide, depuis 2007, 279 enfants ont été placés sur une population de 450 (chiffre contesté par la DPJ, lire article ci-contre). Pour nous, c’est une autre phase des écoles résidentielles. Les familles ont décidé de manifester pour demander de ravoir leurs enfants. Tous les membres des Premières nations sont invités à se rassembler. Nous voulons que la loi sur la protection de la jeunesse soit adaptée aux Autochtones. S’il y a des problèmes dans les familles, nous pensons qu’il vaut mieux les aider plutôt que de retirer les enfants. Il faut travailler avec les familles plutôt que de les briser.»
Le point de vue de la Direction de la protection de la jeunesse
SYLVIE DEJOUY
sdejouy@lagatineau.com
LA GATINEAU - Selon des données de First Nations Caring Society, datant de 2011, quelque 27 000 enfants autochtones vivaient alors en famille d’accueil au Canada, comparativement aux 8 900 qui étaient élevés dans les pensionnats au plus fort de cette époque soit en 1949. Environ un enfant autochtone sur dix était placé dans une famille d’accueil.
Ces chiffres ne veulent pas dire que les services ont tendance à plus placer les enfants autochtones mais ils sont révélateurs des problématiques que vivent des communautés. Certaines d’entre elles ont mis en place des services d’intervention de première ligne pour aider les parents en difficulté et éviter le placement de leurs enfants.
Du côté de la Direction de la protection de la jeunesse, Michelyne Gagné, directrice rattachée au Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais, explique qu’elle ne peut pas commenter le cas du couple cité dans l’article ci-contre, pour des raisons de confidentialité. Pour ce qui est de
la problématique en général, elle reconnaît «qu’en proportion, il y a plus d’enfants des Premières nations qui sont signalés au directeur de la protection de la jeunesse. Je n’attribuerais pas ça au fait que ce sont des Autochtones mais au fait que dans certaines communautés il y a des problématiques très importantes qui font que les gens ne peuvent pas actualiser leurs responsabilités parentales, tout comme dans certains quartiers de nos villes où il y a des gens en très grande difficulté.»
Concernant les procédures de placement d’enfants, Michelyne Gagné explique que «la DPJ applique la loi sur la protection de la jeunesse qui est valable pour l’ensemble des enfants du Québec, y compris ceux des Premières nations, pour assurer leur sécurité et leur développement, de façon équitable pour tous les enfants. On travaille avec deux communautés en Outaouais : Kitigan Zibi et Lac Barrière (aussi appelé Lac Rapide, NDLR). Depuis les quinze dernières années, ce sont 77 enfants qui ont été retirés de leur milieu familial temporairement au Lac Barrière et la grande majorité de ces enfants ont été confiés à des familles autochtones. Dans nos façons de travailler, on tient entre autre un conseil de personnes
significatives quand il faut retirer temporairement les enfants de leur milieu. On assoie ensemble tous les gens significatifs pour les enfants. La loi nous oblige aussi à commencer par chercher auprès des personnes qui sont significatives pour les enfants. En tout temps on va privilégier une famille autochtone pour s’occuper d’un enfant autochtone.»
Mais Michelyne Gagné souligne qu’il «y a des communautés qui ont de grands défis à relever, tout comme des groupes de population allochtone, et qui ont des difficultés par exemple avec de la violence, toxicomanie, problèmes de santé mentale, qui font en sorte que les parents ne sont pas en mesure, à court terme, de prendre soin de leurs enfants et de leur assurer la sécurité et le développement dont ils ont besoin. On essaye d’abord de les maintenir dans leur milieu familial mais quand les enfants ne sont pas protégés on pourrait les déplacer temporairement. Quand on a eu quelques situations où les enfants sont allés dans des familles d’accueil blanches, c’était exceptionnel et c’était vraiment parce qu’on ne trouvait pas de familles autochtones pour s’en occuper. Et on essaye à tous les jours d’adapter nos pratiques à la culture et aux
traditions de ces deux communautés, pour qu’elles puissent notamment développer leurs services de première ligne ce qui leur permettrait d’aider leur communauté à ne pas en arriver à des situations qui mettent les enfants en danger.»
À VENDRE
Honda Rubicon 500 Camo
4995
$
FINANCEMENT SUR PLACE
Les Sports
FRÈRES
383, boul. Desjardins, Maniwaki
819-449-1001 www.sportsdault.com


































































































   5   6   7   8   9